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Alors que les 133 cardinaux électeurs se préparent à entrer dans la Chapelle Sixtine pour élire le successeur du pape François, peu de personnes comprennent le fonctionnement interne du Vatican mieux que Loup Besmond de Senneville. L’ancien correspondant au Vatican pour La Croix et auteur de « Vatican Secret : Quatre années au cœur du plus petit État du monde » offre des perspectives uniques sur ce qui rend ce conclave extraordinaire.
« Ce qui se passe aujourd’hui, c’est une élection avec un corps électoral assez étrange, » explique Loup Besmond de Senneville, plantant le décor. « 133 cardinaux — tous des hommes de moins de 80 ans — venant de 70 pays différents. »
Cette diversité internationale, souligne-t-il, crée une dynamique fascinante qu’on ne voit dans aucune autre élection mondiale. « Ils viennent de nombreux pays différents, créant différentes cultures, différentes attentes et différentes approches — y compris différentes approches de la foi catholique et du rôle de l’Église. »
Ces perspectives variées ne font pas qu’ajouter de la couleur aux procédures — elles façonnent fondamentalement le résultat. « C’est ce qui rend cette élection spéciale, » souligne-t-il.
Le développement le plus significatif dans l’histoire catholique récente, selon Loup Besmond de Senneville, est le déplacement démographique de l’Église vers le sud — une réalité que le pape François a à la fois incarnée et reconnue.
« Aujourd’hui, 70% des catholiques sont dans l’hémisphère sud, » note-t-il, soulignant le contraste avec la déchristianisation en cours en Europe et en Amérique du Nord. « Le moteur de croissance de l’Église catholique est vraiment au Sud, et l’enjeu est la façon dont les catholiques du Sud et les dirigeants catholiques du Sud se feront entendre. »
Ce déplacement représente l’héritage le plus significatif du pape François. « Le pape François était certainement le pape du pivotement vers le Sud. Il ne l’a pas organisé — il l’a reconnu, » réfléchit le journaliste. « D’abord, c’est un pape argentin, clairement du Sud global, et ensuite il a changé la perspective de l’Église, lui faisant regarder le monde différemment. »
Cette perspective méridionale se manifeste dans des approches concrètes du soin pastoral. « Le pape François disait que l’Église catholique n’est pas une église qui impose des règles à tous. C’est une maison qui accueille les catholiques, les fidèles et les gens tels qu’ils sont, les accompagnant pour une partie de leur voyage, » explique Loup Besmond de Senneville.
« C’est vraiment une approche latino-américaine, vraiment une approche du Sud, » poursuit-il. « Les cardinaux du Sud disent souvent : ‘Vous, au Nord, vous avez l’histoire ; nous, nous avons la réalité.’ Donc ils regardent la réalité telle qu’elle est — et c’est l’approche que le cardinal Bergoglio, le pape François, qui est mort il y a quelques jours, a beaucoup soulignée. »
Loin d’être isolée des événements mondiaux, l’Église catholique reflète les tensions globales. « L’Église catholique n’est pas une sorte d’entité isolée complètement coupée du monde, » observe Loup Besmond de Senneville. « Elle est dans le monde, donc elle est traversée par les tensions du monde. »
Ces réalités géopolitiques influencent inévitablement les cardinaux électeurs. « À l’ère de Donald Trump et de Poutine, il y a des questions de l’extérieur qui vont s’inviter, » explique-t-il. « La question des cardinaux sera aussi : Quel pape peut se faire entendre dans ce monde qui est en train d’être bouleversé, dans cet ordre mondial qui est en train d’être perturbé — face à Trump, face à la Chine, face à Poutine ? »
Cette dimension géopolitique ajoute une autre couche de complexité à une décision déjà multifacette.
Dans son livre « Vatican Secret », Loup Besmond de Senneville révèle des aspects surprenants de la vie au Vatican, y compris des préoccupations d’espionnage qui restent pertinentes pendant le conclave.
« Le Vatican est espionné parce que c’est un lieu d’information, » explique-t-il avec pragmatisme. « Le Vatican a beaucoup d’informations, notamment sa diplomatie pontificale, qui se fonde sur des informations qui lui sont remontées par des communautés et des congrégations religieuses dans le monde entier. »
Cette intelligence a une valeur bien au-delà des cercles religieux. « Ces informations ont de la valeur pour les services de renseignement du monde entier, » note le journaliste. « Donc c’est aussi un lieu qui est scruté par d’autres puissances étrangères. Ce sont des choses qu’on a pu observer ces dernières années, et c’est un risque dont le Vatican est bien conscient. »
Alors que le monde guette la fumée blanche au-dessus de la Chapelle Sixtine, les perspectives de Loup Besmond de Senneville nous rappellent que cet événement spirituel se déroule au sein d’un réseau complexe de réalités culturelles, historiques et géopolitiques — où l’avenir d’une Église de 1,4 milliard de croyants est en jeu.
Écrit par: Simon Marty