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today7 mai 2025 151 1 5
Alors que 133 cardinaux électeurs entrent aujourd’hui dans la Chapelle Sixtine pour élire le successeur du pape François, beaucoup considèrent le conclave à travers une perspective politique, analysant les structures de pouvoir, les influences géographiques et les divisions factionnelles. Mais le philosophe et théologien Emmanuel Tourpe nous invite à voir au-delà de ces perspectives mondaines.
Interrogé sur le rôle de l’Esprit Saint dans le conclave, Emmanuel Tourpe dissipe immédiatement toute notion d’intervention magique. « Il ne faut surtout pas le prendre sous la forme d’une espèce de magie qui interviendrait à la manière de Harry Potter, » explique-t-il avec un léger rire. « Par contre, il y a une réalité qu’il faut bien prendre en compte. »
Alors que les médias ont passé des semaines à analyser les réseaux d’influence humaine au sein du Collège des cardinaux, souligne notre invité « l’envers de la tapisserie », tissé par les mains de Dieu. « Il y a une réalité qu’on ne peut pas retirer — c’est que Dieu et la providence de Dieu agira quoi qu’il advienne dans cette élection. Quel que soit le pape élu, il sera un fruit de l’Esprit et de la volonté de Dieu. »
Le conclave, souligne Emmanuel Tourpe, est nettement différent des élections politiques ou des procédures parlementaires. C’est fondamentalement une célébration liturgique d’abord — une célébration de prière où les cardinaux se laissent inspirer par l’Esprit Saint pour discerner qui parmi eux serait le mieux à même de diriger l’Église catholique.
« La réalité interne, du point de vue de Dieu, c’est que l’Église est un instrument pour l’Esprit Saint, » observe-t-il. « C’est quelque chose de souple, un peu comme une harpe pour l’Esprit Saint. »
L’un des moments les plus dramatiques dans le rituel du conclave survient lorsque le maître des célébrations liturgiques pontificales s’exclame « Extra omnes! » — « Tout le monde dehors ! » — avant de sceller les cardinaux dans la Chapelle Sixtine. Pour Emmanuel Tourpe, cette phrase contient un paradoxe fascinant.
« Il y a quelque chose de paradoxal dans ce ‘tout le monde dehors’, » réfléchit-il pensivement. « Car en fait, ils vont faire exactement le contraire. Le pape qu’ils vont élire ne sera pas seulement celui qui met ‘extra omnes’, mais au contraire qui devrait avoir un sens profond de la mission : ‘intra omnes’ — ‘venez tous’ dans l’Église. »
Ce moment de silence — en contraste frappant avec le monde d’aujourd’hui fait de bruit des médias sociaux, de rumeurs et de paroles inutiles — crée un espace pour la présence divine. « Jésus a dit qu’on devra rendre compte de toute parole inutile, » note Emmanuel Tourpe. « Ces paroles inutiles seront éteintes, et tous se concentreront autour de la parole de Dieu, autour du bien de l’Église. »
Parmi les contributions les plus significatives du pape François figurait son accent sur la synodalité — la reconnaissance que l’Église n’est pas centrée exclusivement sur le pape mais inclut des rôles significatifs pour les églises locales. C’est une idée que Emmanuel Tourpe croit que le prochain pape doit poursuivre.
« D’une manière un peu étrange, au cours des deux ou trois dernières semaines, nous avons été très concentrés sur la figure du pape — sur un pape qui précisément a souligné que l’Église n’est pas uniquement dans la figure de Pierre, et que les églises locales ont un rôle, » observe-t-il avec une subtile ironie.
Se référant au théologien français renommé Henri de Lubac, Emmanuel Tourpe explique que l’Église catholique est « une communion d’églises particulières » où « ma paroisse, mon diocèse est tout autant l’Église catholique » que Rome. Le prochain pape devra maintenir cette « tension difficile » entre reconnaître que « tous les chemins mènent à Rome » tout en affirmant simultanément que « chaque église locale est elle-même l’Église catholique. »
Dans nos dernières minutes avec notre invité, il réfléchit à la raison pour laquelle le conclave fascine les gens du monde entier, y compris les non-croyants. Si la forme ritualisée — avec les gardes suisses en uniformes d’époque Renaissance et des cérémonies séculaires — attire les regards curieux, Tourpe croit que quelque chose de plus profond retient l’attention.
« Au-delà de cette forme, il y a un fond, un rayonnement, une lumière qui traverse cette forme qui je crois attire beaucoup plus que ces curiosités anecdotiques, » suggère-t-il.
Dans un monde secoué par des nouvelles chaotiques — « ce matin, une guerre a commencé entre l’Inde et le Pakistan, » note-t-il — le conclave représente un moment où « une verticalité s’impose » sur l’histoire humaine. C’est une pause sacrée quand les cardinaux disent, « Sortez, tous les bruits inutiles, toutes les guerres inutiles. Et maintenant laissons parler l’Esprit Saint. »
Alors que le monde guette la fumée blanche s’élevant au-dessus de la place Saint-Pierre, Emmanuel Tourpe nous rappelle que sous l’apparat et la politique se trouve une rencontre avec le sacré — une rencontre qui continue de captiver l’imagination de l’humanité à travers les systèmes de croyance et les frontières.
Écrit par: Simon Marty