Conclave 2025

Aymeric Pourbaix : « La fascination du conclave réside dans son mystère spirituel »

today7 mai 2025 13

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Alors que l’attention du monde se tourne vers la Chapelle Sixtine où 133 cardinaux électeurs vont sélectionner le 267e successeur de saint Pierre, le journaliste Aymeric Pourbaix offre une perspective expérimentée sur ce moment historique. Le rédacteur pour France Catholique et présentateur de « Enquête d’Esprit » sur CNews partage ses réflexions sur les candidats potentiels à la papauté, la fascination des médias pour le conclave, et les dimensions spirituelles souvent négligées dans la couverture médiatique conventionnelle.

Au-delà des favoris : un conclave de surprises

Interrogé sur les potentiels favoris émergeant des Congrégations Générales, Aymeric Pourbaix reconnaît la sagesse conventionnelle tout en ajoutant d’importantes nuances.

« Le cardinal Parolin, qui était le numéro deux, si l’on peut dire, au Vatican sous le pape François, fait figure de grand favori, » explique-t-il, faisant référence au cardinal italien Pietro Parolin qui a servi comme Secrétaire d’État. « Mais pour cette raison même, il a été extrêmement attaqué durant les discussions qui ont précédé le conclave, que ce soit dans la presse italienne ou par des rumeurs de part et d’autre. »

Ces tentatives délibérées de miner la candidature de Parolin pourraient changer la dynamique, suggère Aymeric Pourbaix. « On verra si ces rumeurs ont en quelque sorte fait baisser l’intérêt de sa candidature pour les autres cardinaux. Et si, dans ce cas, d’autres de ‘second ordre’ — en tout cas, moins en vue — pourraient avoir leur chance. »

Le but spirituel transcende la politique

Malgré son instinct de journaliste qui l’amène à analyser les dimensions politiques, Aymeric Pourbaix souligne que le but fondamental de l’élection reste spirituel.

« Ce qui me semble important, en tant que croyant, c’est d’abord que ce soit un pape qui corresponde au but spirituel de l’Église, » réfléchit-il. « Je trouve que c’est très beau de voir ici à Rome ce matin tous ces gens qui font la queue pour accéder à la place Saint-Pierre où sera célébrée la messe pour prier pour le pape. »

Cette vague de prière des catholiques ordinaires émeut profondément Aymeric Pourbaix. « Voir toutes ces intentions de prière des croyants et des fidèles qui ont à cœur qu’un pape soit élu selon la vision de Dieu — pas pour telle ou telle politique ou sensibilité, mais finalement pour servir le bien des âmes, ce qui correspond au premier objectif d’un successeur de Pierre. »

La fascination médiatique à l’ère des réseaux sociaux

L’attention médiatique mondiale sur le conclave ne surprend pas Aymeric Pourbaix, qui voit à la fois une continuité historique et de nouvelles dimensions dans cette couverture.

« Toutes les élections papales ont toujours fasciné parce que c’est une élection à nulle autre pareille, » explique-t-il. « Il y a certes un vote, mais il se produit à huis clos. Donc il y a cette fascination pour le secret, pour tout ce qui constitue ce qu’on a appelé la ‘pompe’ — la solennité de la liturgie pontificale d’élection, des cardinaux qui se dirigent en procession vers la Chapelle Sixtine, on ferme les portes — tout ça est extrêmement saisissant. »

Ce qui est différent cette fois, note Aymeric Pourbaix, c’est le rôle sans précédent des réseaux sociaux. « C’est le premier conclave où les médias et les réseaux sociaux ont pris autant d’importance dans la vie. Ce n’est pas pour rien que les cardinaux, en entrant à la résidence Sainte-Marthe, laissent leur téléphone portable à l’entrée et ne le récupéreront qu’après la fin du conclave. »

Cette déconnexion numérique protège l’intégrité d’une élection qui a été « peut-être la première à être autant — j’allais dire ‘polluée’ — il y a un peu de cela — par les informations, contre-informations ou contre-vérités qui ont circulé pendant ces derniers jours. »

L’ordre après la transformation : attentes pour le prochain pape

Après douze années du pontificat transformateur du pape François, Aymeric Pourbaix perçoit un désir de consolidation parmi de nombreux catholiques.

« La première attente, c’est que c’était un pontificat qui a beaucoup déménagé, dans tous les sens, et de manière générale, que ce soit les cardinaux, mais peut-être aussi une partie des fidèles, il y a une aspiration à ce que le successeur remette un peu d’ordre, » explique-t-il.

Cela inclut d’aborder des irrégularités canoniques qui ont émergé pendant le pontificat de François. « Je pense par exemple à la nomination d’un laïc, d’une femme, à la tête d’un dicastère, alors que le droit canon exige un cardinal, » note le journaliste, suggérant que réaligner la pratique avec le droit de l’Église est une priorité importante.

La division sur la synodalité

Selon lui, la question peut-être la plus significative à laquelle le prochain pape sera confronté est de savoir s’il faut continuer l’accent mis par François sur la synodalité — l’approche collaborative de la gouvernance de l’Église impliquant la consultation à tous les niveaux.

« Faut-il continuer dans cette dynamique de consultation tous azimuts qu’a lancée le pape François — au risque, pour certains, d’arriver à une démocratisation de l’Église qui n’est absolument pas dans sa constitution, qui est hiérarchique et verticale ? » demande rhétoriquement Aymeric Pourbaix. « Ou, d’un autre côté, faut-il revenir à plus de verticalité, plus de sacré, plus de hiérarchie — parce que l’Église est composée d’hommes, mais elle est aussi divine, inspirée par l’Esprit Saint, et par conséquent, il y a cette verticalité qui passe aussi par les sacrements ? »

Cette question fondamentale sur la nature et la gouvernance de l’Église a été un thème central dans les discussions des cardinaux. « La durée du conclave et le choix du successeur de Pierre sera déterminante pour comprendre dans quelle direction l’Église veut aller pour l’avenir, » conclut Aymeric Pourbaix.

Alors que le monde catholique prie pour une guidance divine dans cette décision capitale, Aymeric Pourbaix nous rappelle qu’au-delà de l’analyse politique et de la spéculation médiatique se trouve un processus spirituel profond — un processus qui continue de captiver croyants et non-croyants.

Écrit par: Simon Marty

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