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Comment rendre tangible l’histoire de la Shoah pour les lycéens d’aujourd’hui ? Au lycée Carcouët de Nantes, Riselaine Chapel a développé une méthode originale : partir de l’histoire locale pour donner corps à cette période tragique. Son approche, qui s’appuie sur un travail minutieux dans les archives départementales, permet aux élèves de découvrir que la Shoah s’est aussi déroulée dans les rues qu’ils empruntent quotidiennement.
« La stupéfaction vient quand les élèves reconnaissent une rue, quand l’un d’eux me dit ‘Mais madame, je fais du basket dans cette rue, je sais où c’est' », explique l’enseignante. Cette reconnaissance du terrain familier provoque un déclic : l’histoire devient concrète, les victimes ne sont plus des chiffres abstraits mais des commerçants, des lycéens, des familles qui vivaient là.
Son travail actuel se concentre sur les rafles des 15, 16 et 17 juillet 1942 à Nantes, un épisode souvent éclipsé par la rafle du Vel d’Hiv à Paris. Vingt-cinq personnes furent arrêtées, dont un lycéen de 16 ans en plein cours. Ce projet, mené en collaboration avec la mairie de Nantes et le site patrimonial, vise à créer un parcours mémoriel dans la ville.
L’approche de Riselaine Chapel repose sur trois piliers :
Cette méthode permet également d’exercer l’esprit critique des élèves. Par exemple, en travaillant sur l’histoire de Cécile et Fannie Ange Vik, ils découvrent que plusieurs sites internet les déclarent mortes à Auschwitz, alors qu’elles ont survécu après avoir été sélectionnées pour le travail.
« Je mène ces projets de mémoire depuis une dizaine d’années maintenant », souligne Riselaine Chapel. Cette continuité permet d’affiner la méthode et d’en mesurer les impacts. Le projet actuel au lycée Carcouët, entamé il y a quatre ans, illustre l’importance d’inscrire ce travail dans la durée.
Riselaine Chapel insiste sur la différence entre « devoir de mémoire » et « travail de mémoire ». Elle privilégie la seconde approche, plus active et réflexive. En tant que professeure d’histoire-géographie et de géopolitique, elle aide ses élèves à faire le lien avec l’actualité, tout en maintenant une approche historienne rigoureuse.
Cette méthode pédagogique innovante montre qu’il est possible de transmettre la mémoire de la Shoah de manière vivante et engageante, en s’appuyant sur l’histoire locale pour donner du sens à l’histoire globale. Le succès de cette approche repose sur un équilibre subtil entre rigueur historique et proximité émotionnelle, entre travail d’archives et rencontres humaines.
Pour avoir un aperçu du travail des élèves : https://yadvashem-france.org/projets-pedagogiques/lycee-carcouet-travail-de-memoire-sur-les-rafles-a-nantes/
Écrit par: Simon Marty