Au Nord du Diocèse, l’Église expérimente de nouveaux modèles d’implantation. À Guéméné-Penfao, l’évêque de Nantes a choisi de miser sur une approche différente : envoyer une équipe mission plutôt qu’un prêtre isolé. Quatre ans plus tard, cette expérience porte ses fruits.
Quand l’évêque pense laboratoire
L’initiative part d’un constat lucide. « L’évêque voulait faire comme un laboratoire de la mission en milieu rural », révèle le père Arnaud de Guibert lors de l’émission « Le Tour des clochers » de Radio Fidélité, animée par Tiphaine Sellier. Cette formulation n’a rien d’anodin. Elle traduit une approche expérimentale assumée.
Monseigneur Laurent Percerou, évêque de Nantes depuis 2020, a choisi une approche différente pour Guéméné-Penfao et ses 11 clochers. Plutôt que d’envoyer un prêtre seul, il a constitué une équipe pastorale.
« Il m’a dit qu’il me donnait carte blanche », confie le père de Guibert. « C’est jamais tout à fait carte blanche, on le sait bien. Mais l’idée était vraiment de repenser l’approche. »
L’équipe mission : un modèle collaboratif
Le dispositif mis en place réunit plusieurs acteurs. Le père Arnaud de Guibert dirige l’ensemble paroissial, épaulé par le père Gaston. L’équipe comprend également des laïcs en mission : Capucine et Nathan Baudelet, couple engagé dans la mission Isidore, Jean-Claude Lem comme diacre permanent, ainsi qu’une coordinatrice paroissiale.
Cette structure permet d’éviter l’isolement du prêtre rural, souvent seul face à des territoires étendus. « Parfois vaut mieux à deux », reconnaît le père de Guibert.
Capucine Baudelet incarne parfaitement cette nouvelle donne. Installée depuis deux ans avec son mari Nathan, elle explique leur démarche : « L’idée c’était de tout quitter pour partir vraiment au service d’une paroisse. On avait à cœur d’être dans une paroisse de campagne en France. »
Mission Isidore : l’évangélisation en famille
La mission Isidore permet à des couples de s’installer durablement en milieu rural, conciliant vie familiale et engagement religieux. « Dans le quotidien, ça s’incarne très simplement », explique Capucine Baudelet. « C’est partager la vie quotidienne. »
Les missionnaires Isidore bénéficient d’un logement indépendant tout en partageant certains moments communautaires. « Le matin on se retrouvait pour prier les laudes à 7h30 et souvent à midi, on priait l’office », précise la jeune mère de famille.
Nathan Baudelet a lancé un groupe pour les hommes, le groupe Saint-Joseph. Son épouse anime un groupe de prières des mères et accompagne les grands jeunes préparant un sacrement.
Collaboration paroisse-commune
La collaboration entre paroisse et commune fait partie de l’approche développée à Guéméné-Penfao. Isabelle Barathon-Bazelle, maire de Guéméné-Penfao, participe aux émissions de Radio Fidélité aux côtés du père de Guibert.
Le patronage Saint-Michel, qui fête ses 130 ans, constitue un exemple de cette collaboration. « Nous échangerons sur les projets de la ville », annonce Tiphaine Sellier en présentant l’intervention de la maire.
Les résultats de l’expérience
Quatre ans après le lancement, les premiers effets sont visibles. La consécration de l’autel de Plessé l’été dernier a rassemblé de nombreux fidèles. « Une liturgie aussi déployée, ça dure quand même 2 heures », raconte le père de Guibert. « Les gens ont été très touchés. »
Cette cérémonie pour les 150 ans de l’église a marqué la communauté. « L’évêque a comparé cette consécration aux soins que les saintes femmes ont apportés au corps de Jésus », relate le curé. « Je pense qu’ils ne verront plus l’autel de la même manière maintenant. »
L’action auprès des jeunes constitue une autre priorité. « En début d’année, on passe dans les écoles primaires pour la bénédiction des cartables », détaille le père de Guibert. « Hier je suis passé au collège avec l’animatrice en pastorale, on est passés dans neuf classes. »
Méthode d’implantation : l’écoute du terrain
L’approche développée à Guéméné-Penfao repose sur l’écoute. « On trouve des gens en arrivant, on trouve des projets en arrivant », observe le père de Guibert. « On a d’abord à écouter la vie des paroisses. »
« Comme disait le pape François, sentir l’odeur des brebis », cite le prêtre. Le temps devient un choix prioritaire. « Toute l’énergie, tout le temps que je choisis de mettre là, bien sûr, je ne mets pas ailleurs », assume le père de Guibert. « C’est un gros levier de notre liberté de choisir où est-ce qu’on va passer du temps. »
Perspectives d’extension
Cette expérience peut-elle être reproduite ailleurs ? Les éléments semblent réunis : une volonté de l’évêque, une équipe constituée, un ancrage local et une méthode d’écoute.
« Osons, soyons audacieux et créatifs dans notre approche tout en restant unis dans notre mission », encourage le père de Guibert. La mission Isidore se développe dans plusieurs régions françaises.
Vie paroissiale et projets
L’action auprès des jeunes reste centrale dans l’approche du père de Guibert. « Je pense que l’évangile est vraiment fécond pour l’éducation des enfants et des jeunes », affirme-t-il. « C’est-à-dire que toute l’énergie, tout le temps que je choisis de mettre là, bien sûr, je ne mets pas ailleurs. »
Les activités se déclinent concrètement : passage dans les classes du collège, bénédiction des cartables dans les écoles primaires, organisation de soirées pour les jeunes. « Il y a le patronage dont on va parler tout à l’heure », précise le curé lors de l’émission.
Cette priorité donnée à la jeunesse s’inscrit dans les deux axes définis par le père de Guibert : « l’éducation des jeunes dans la foi et l’annonce de la bonne nouvelle dans ce contexte rural ».
Un territoire aux multiples clochers
L’ensemble paroissial Sainte-Anne-sur-Don-et-Vilaine regroupe les paroisses Sainte-Anne-en-Guéméné-Plessé et Saints-Riowen-et-Méréal-sur-Vilaine. « 11 clochers », précise le père de Guibert, qui compare avec son ancienne affectation : « À Pornic, il y avait 20 000 habitants toute l’année. Ici, les choses reposent beaucoup plus sur le prêtre. »
Cette différence d’organisation influence la pastorale quotidienne. « Vous avez beaucoup moins de gens en responsabilité, prêts à assumer par exemple un nouveau catéchumène ou une fuite d’eau dans une église », explique-t-il. « Comme c’est plus petit, les choses reviennent beaucoup plus vite au curé de la paroisse. »
L’accompagnement des équipes
Le suivi des équipes mission demande une attention particulière. « Il faut que la personne vérifie si cet appel il est bien pour elle », souligne le père de Guibert. « Le discernement, c’est quelque chose de très important. »
« Nous on essaie de pas appeler n’importe qui pour n’importe quoi », précise le curé de l’ensemble paroissial. « Quand les personnes me disent non, vous me rassurez, ça veut dire que j’appelle des gens librement. »
Bilan après quatre ans
Quatre ans après son lancement, l’expérience de Guéméné-Penfao continue. L’équipe pastorale maintient ses activités sur les 11 clochers de l’ensemble paroissial.
« Ensemble, c’est ensemble que nous pouvons toucher des cœurs, apporter de l’espoir », conclut le père de Guibert. Cette conviction guide le projet depuis ses débuts.
L’expérience était nouvelle : constituer une équipe pastorale plutôt qu’envoyer un prêtre seul en milieu rural. Aujourd’hui, Guéméné-Penfao montre qu’une approche collective peut fonctionner dans les territoires ruraux.